Intervention de Madame Emmanuelle BONNOT , professeur de philosophie au lycée des Chaumes à Avallon classe de PSI mardi 16 octobre : quand l’interdisciplinarité permet un autre regard sur l’Amour (suite)

Le cours porte sur LE BANQUET et plus particulièrement sur l’échange entre Diotime et Socrate qui, au lieu de faire l’éloge d’Eros, cherche la vérité sur la nature de l’amour. Platon postule l’immatérialité des âmes qui, dans le Ciel des Idées pures, passent leur existence dans la contemplation. Cette contemplation passe elle-même par une intuition pure de ce qu’est la Vérité car s’incarnant dans un corps, l’âme a oublié ce qu’elle a jadis contemplé mais elle garde pourtant des traces de cette contemplation originelle : c’est la réminiscence. Pour Platon, apprendre, c’est se ressouvenir. L’homme passe de la doxa (opinion commune qui renvoie aux illusions du prisonnier de la caverne) à l’opinion droite (je sais que j’ai une âme) puis atteint le niveau dianoétique du logos pour parvenir enfin au noétique de la Connaissance. C’est le parcours suivi par Eros qui incite l’âme à s’apercevoir de la beauté des beaux corps, puis de celle des belles âmes puis du Beau absolu qui conduit lui-même au bonheur de la contemplation. L’amour étant quête de la Vérité, il s’agit de trouver celui ou celle qui arrivera à nous faire accoucher de notre âme, Eros étant le daimôn qu’on peut définir comme un être intermédiaire entre le monde Sensible et le monde Intelligible. Socrate, daimôn lui-même, fait accéder son interlocuteur à une Vérité sur l’amour ; comme l’amour qui est immuable, Socrate est immuable (il résiste à tout, même au Vin du banquet…) Cette notion de mouvement vient de la philosophie d’Héraclite à laquelle s’oppose Platon, plus précisément au mobilisme qui dit que tout est soumis au changement. Platon, lui, pense que la stabilité vient de l’âme qui est UNE, idée empruntée cette fois à Parménide. Notre âme est vraie et juste donc homogène pour Platon, ce qui ne l’empêche pas de participer de choses opposées ; l’unicité n’exclut pas la pluralité. Notre âme dans le monde réel participe en effet de choses opposées (justice / injustice, vérité / mensonge, beauté / laideur). Et dans le Ciel de l’immuable, l’âme donne une forme de stabilité à ce à quoi elle participe. Ainsi d’Eros qui « est amour du beau », « doit tendre vers le savoir » et « tenir le milieu entre celui qui sait et l’ignorant », lui qui est fils de Poros et de Pénia (Diotime, 204 b) . Chaque disciple ne peut donc que s’élever vers le noétique (vers l’amour) sans jamais l’atteindre.

Catherine Ballay (professeur de français en classes de PCSI et PSI)